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06/09/2010

L'Echappée belle – Anna Gavalda [2001]

L Echappée belle.gifSimon, Garance et Lola, trois frères et sœurs devenus grands (vieux ?), s'enfuient d'un mariage de famille assommant pour aller rejoindre Vincent, le petit frère, devenu guide saisonnier dans un château perdu au fin fond de la campagne tourangelle. Oubliant pour quelques heures marmaille, conjoint, divorce, soucis et mondanités, ils vont s'offrir une dernière vraie belle journée d'enfance volée à leur vie d'adulte.

L'idée du récit, une dernière « tartine d'enfance » pour une fratrie nouvellement trentenaire, façon "tranche de vie", a de quoi séduire. Hélas, Anna Gavalda additionne les clichés avec une sorte de délectation déconcertante (à ce titre, la scène des parisiens débarquant au mariage campagnard, chez les ploucs donc, est ahurissante : une collection de stéréotypes égrainés avec une sorte de condescendance naïve confondante). Quant aux personnages, ils sont tous caricaturaux (l'héroïne jeune femme cultivée, libérée et fière d'elle, le frère parfait qui a pourtant épousé la parfaite chieuse, le benêt du village pervers, le beauf aux blagues douteuses...). De plus, les souvenirs d'enfance, qui auraient pu servir de liant au récit, ne sont évoqués que sous forme d'énumérations façon listes de courses : 3 pages sur les chansons qu'on écoutait quand on était jeune !

Enfin, et pour en finir, on a parfois l'impression d'avoir en main non un roman, mais plutôt un catalogue de VPC : j'ai compté pas moins de 36 noms de marque cités ! Qui a dit « n'importe quoi » ? La preuve par la liste (oui, je les ai tous noté, on s'occupe comme on peut quand une lecture nous em...nnuie) : Persol, Clinique, Guerlain, Estée Lauder, Biotherm, Tod’s, Kaufman & Broad, Meetic, Célio, La Caisse d’Epargne, Castorama, Leroy Merlin, McDonald’s, Pokémon, Casino, Audi, Téfal, Kleenex, Meccano, Lego System, Nesquik, Ovomaltine, Babybel, Caran d’Ache, Kellogg’s, Club Mickey, Ténormine, Paris Match, Closer, Ralph Lauren, Playmobil, Benco, Malabar, Gucci, Uncle Ben’s, Valstar. Un vrai tunnel publicitaire ! Madame Gavalda toucherait-elle des commissions pour les placements de marques dans son roman ?

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e%2020.gif Anna Gavalda, L'Echappée belle, coll. Le Dilettante, 2009 (2001), 164 pages, 10 €.

Du même auteur : Je l'aimais, Ensemble, c'est tout.

31/07/2010

Un roman russe – Emmanuel Carrère [2007]

Un roman russe.gifDans ce "roman", Emmanuel Carrère nous livre sa propre histoire, sa vie quotidienne et intime. On le suit jusqu'en Russie, où il est parti tourner un documentaire sur une petite ville grise et perdue, Kotelnitch, et où il espère renouer avec ses racines russes. Il espère aussi mettre enfin à jour le "secret" entourant le souvenir de son grand-père maternel "disparu" au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, tabou familial dont sa mère refuse obstinément de parler. Mais très vite cette recherche du grand-père vire à l'obsession. Sa quête identitaire apparaît alors comme la clé de son propre équilibre, le symbole de ce qui l'entrave dans sa vie privée. Sa relation amoureuse avec Sophie semble ainsi sous-tendue par les difficultés ou les avancées de son enquête sur son histoire familiale. Cris, larmes, mensonges, tromperies, exigences, chantages... leur relation de couple est aussi passionnée que tumultueuse et douloureuse, et nous est crûment livrée en pâture.

La quête obstinée de l'auteur tourne ainsi bien vite au jeu de massacre, et il y a quelque chose de dérangeant dans cette autobiographie déflagrante dont on ne compte plus, au fil des pages, les victimes : la mère de l'auteur, qui l'avait supplié de ne pas raconter l'histoire de son père (« Emmanuel, je sais que tu as l'intention d'écrire sur la Russie, sur ta famille russe, mais je te demande une chose, c'est de ne pas toucher à mon père, pas avant ma mort ») ; Sophie, qui voit publiée sa vie amoureuse et sexuelle ; les fils de l'auteur, qui peuvent lire le peu d'amour que leur père portait à leur mère ; etc.

Un roman russe est l'exemple typique de ce que je n'aime pas : l'autofiction outrancière, avec exposition impudique de la vie privée et buzz médiatico-marketing autour du nom de l'auteur et de sa célèbre filiation. En effet, si un tel roman constitue très certainement un bon exutoire pour l'auteur, un exorcisme de ses démons familiaux, pour le lecteur, quel intérêt ? Le travail littéraire, me direz-vous ? Propre, net, précis. Sans éclat.

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e%2020.gifEmmanuel Carrère, Un roman russe, éd. P.O.L, coll. Fiction, 2007, 356 pages, 19,50 €.

Du même auteur : La moustache & L'adversaire

05/03/2010

Laure du bout du monde – Pierre Magnan [2006]

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Laure du bout du monde.gifLaure est né à « l'extrême bord du monde », comprenez à Eourres, petit village de Provence, perdu entre les montagnes sculptées par le vent. Un pays sans grâce, un coin sauvage, reculé, isolé et silencieux, un endroit où la nature ne laisse guère de place à l'humanité. Laure pèse 750 grammes lorsqu'elle naît d'une mère incapable de l'aimer. Elle n'aurait pas du survivre mais elle fut sauvée par l'amour et la prévenance de sa grand-mère et de ses tantes. Laure est une gamine tenace, qui a du caractère et qui tient à la vie. À onze mois, la voilà qui lance un tonitruant « salut la compagnie », reprenant ainsi les mots avec lesquels le facteur salue chaque matin les gens de la ferme. À 3 ans, elle apprend à lire sur le calendrier des postes, et à 6 ans, à conduire le troupeau. Et dans la ferme où chaque jour la tâche, difficile, se répète, personne, jamais, ne prononce le mot aimer.

« Qu'est-ce que ça veut dire aimer ?
- Je l'ai lu dans un livre, dit Laure.
- A la maison, depuis que je suis né, personne, tu entends bien ? personne ! n'a jamais prononcé ce mot. Le mot aimer et le mot tendresse n'ont jamais fait souche ici. Le bonheur, ajouta le grand-père, c'est une distraction de riches ! »

Mais Laure sait lire le monde, apprécier les poiriers en fleur et les parterres de muguet, et elle garde, toujours, une indomptable joie de vivre. Et elle ne se résigne pas. Elle sera ainsi sauvée d'un destin tout tracé par sa curiosité du monde, son amour des livres et du savoir, mais restera liée à jamais au pays rude qui l'a vu naître et qu'elle ne renie pas.

Pierre Magnan livre avec ce roman le joli portrait d’une petite fille tenace et attachante, une histoire simple où l'on se glisse sans peine. Au fil de la lecture sourd un sentiment de tristesse et de tendresse mêlée pour cette petite fille courage bien malmenée par la vie. Toutefois, la succession de difficultés et de malheurs que rencontre Laure paraît excessive : le procédé, trop démonstratif, alourdit quelque peu le récit.

Ce roman est aussi une plongée dans un naguère qui longtemps parut immuable mais qui pourtant actuellement se délite, inexorablement. Et l'on ressent toute la nostalgie de l'auteur pour cette vie rurale qui disparaît peu à peu et à laquelle il rend hommage.

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Pierre Magnan, Laure du bout du monde, éd. Gallimard, coll. Folio, 2007 (2006), 293 pages, 7,10 €.

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Un livre proposé par Hathaway.

Les avis de Stéphie, Fashion, Yueyin, Isil, Levraoueg, Armande, Keisha, Chimère, Pascale, Yoshi, Leiloona & Restling.

25/01/2010

Truismes – Marie Darrieussecq [1996]

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Truismes.gifDans un monde proche du notre mais aux vagues allures futuristes, une jeune femme se métamorphose peu à peu en truie. Sous la forme d'un monologue, elle relate son histoire : elle décrit les premiers symptômes de sa mutation physique (sa chair qui s'arrondit et rosit jusqu'à la poussée de mamelles) et psychique (son aversion soudaine pour la charcuterie) tout en racontant aussi son quotidien totalement bouleversé par sa transformation bien difficile à gérer ! Un roman qui se veut à la fois conte fantastique licencieux et satire sociale : de grandes prétentions donc pour un récit que j'ai trouvé au final assez pénible. Découvrir la suite...

07/01/2010

Le baby-sitter - Jean-Philippe Blondel [2010]

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Le baby-sitter.gifAlex est étudiant et fauché. Mais il ne manque pas d'idées : il décide de proposer ses services en tant que soutien scolaire, ou même baby-sitter. Qui sait ? Homme et baby-sitter, ça doit être possible ? Il dépose donc une petite annonce à sa boulangerie, et justement la boulangère, Mélanie, qui souhaite pouvoir retrouver son mari certain soir en tête-à-tête, l'engage. Puis, le bouche à oreille aidant, la proposition d'Alex va rencontrer un succès inespéré et bien vite son rôle va dépasser la simple garde d'enfants. Au fil du temps il devient le confident, le complice, l'ami de couples en dérive et de parents solitaires. Témoin des petits drames ainsi que des joies fragiles qui jalonnent toute existence, il écoute, il parle, il comprend, il apprend à connaître ces adultes qui cachent tous une blessure. Et ce qui ne se présentait que comme un job d'appoint va donner un sens à sa vie.

Le style de Blondel est inventif, léger et fluide, teinté d'humour, toujours aussi agréable : « Zen. Alex se sent zen par rapport à tout ça. Alex se sent zen par rapport à tout, au fur et à mesure de la soirée. Bien sûr, cela a à voir avec la maturité qui se fait lentement. Mais, soyons lucides, cela a encore davantage à voir avec le gin qu'il ingurgite, à toutes petites gorgées. » Mais le récit est parsemé d'erreurs bizarroïdes. Par exemple Marc, l'un des parents engageant Alex, est présenté comme étant prof de français, puis 20 pages plus tard devient prof d'anglais (?!?), ou encore, alors que la narration suit le déroulé d'une année scolaire, on nous annonce que nous sommes en janvier, puis finalement non, nous sommes en fait en novembre pour une même action. Rien de bien grave, mais ces petites incohérences sont un peu déroutantes.

Quant à la morale du livre, elle s'avère d'un optimisme béat que j'ai trouvé un peu niais et agaçant : bien que l'existence soit une succession de petits et grands drames il convient, d'après Monsieur Blondel, de la prendre avec légèreté, la solidarité et la fraternité devant pallier les carences de nos vies... Un message certes positif et porté par un bel espoir, mais le coup du carpe diem, on nous l'a déjà fait !

Bref, une petite histoire agréable à lire, qui ménage son lot de surprises, de sourires et de pincements au coeur ; un récit un peu convenu, un peu inégal, mais qui reste sympathique.

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Jean-Philippe Blondel, Le baby-sitter, 2010, éd. Buchet-Chastel, 297 pages, 19 €.

Merci à Libfly et aux Editions Buchet-Chastel de m'avoir fait parvenir ce livre.

Du même auteur : This is not a love song.